Crise scolaire, crise de l’éducation, crise des valeurs
PANEL DE L'AMICALE DES ANCIENS ELEVES DE L'ECOLE NORMALE WILLIAM PONTY
Crise scolaire, crise de l’éducation, crise des valeurs : causes,
conséquences et solutions possibles.
Mercredi 17 mai 2023
LA VIDEO DE LA CONFERENCE, APRES LA MUSIQUE...
La première conférence de l'année 2023 de l'Amicale des Anciens Elèves de l'Ecole Normale William Ponty a eu lieu le mercredi 17 mai, dans l'amphithéâtre Ahmet Baba, de la Faculté des Sciences et Technologies de l'Education et de la Formation (FASTEF) de Dakar. Le thème de la la rencontre : Crise scolaire, crise de l’éducation, crise des valeurs : causes, conséquences et solutions possibles, a été traité par d'éminents professeurs, MM Souleymane GOMIS, Moussa FALL et Alioune Moustapha DIOUF, avec comme modérateur l'ancien Secrétaire général du MEN, M. Mafakha TOURE, après le discours inaugural du Président de l'Amicale, M. Modou NDIAYE. C'était en la présence de personnalités dont M. Mansour SY, également ancien Pontin, et d'un public venu nombreux.
[…] C’est un honneur et naturellement un grand plaisir pour moi au nom de tous les membres de l l’Amicale des AENWP de vous accueillir à cette conférence que nous organisons sur le thème : Crise scolaire, crise de l’éducation, crise des valeurs : causes, conséquences et solutions possibles.
En 1992 déjà, à la création de notre association avec Monsieur Amadou Ndiagne SoW comme président, la toute première conférence organisée à l’hôtel de ville de Thiès portait sur le thème de l’école. Après quelques autres manifestations culturelles, l’Amicale a connu une longue période d’inactivité. A sa relance quelques années plus tard, avec Monsieur Ibra Diouf NIOKHOBAYE à la tête du CPE, le thème de l’école est resté au cœur de ses préoccupations avec des activités et des réflexions toujours au service du système éducatif de notre pays. On retient en particulier l’important document produit par le Comité Scientifique et Pédagogique, sous la direction de Alioune Moustapha DIOUF et intitulé « contribution à l’amélioration de l’utilisation des outils de la continuité pédagogique au Sénégal » pendant la difficile période de la pandémie, document remis au Ministère de l’Education Nationale.
Qu’il y ait un tel attachement de notre amicale à cette thématique de l’école relève tout naturellement de l’ordre normal des choses, l’Ecole Normale William Ponty, s’étant fixé, en effet, dès l’origine en 1903 à Saint-louis, comme mission prioritaire de former au métier d’instituteur. Ecole fédérale, William Ponty accueillait les élèves de toute la sous-région d’Afrique francophone subsaharienne (ex AOF). Certes, elle préparait aussi aux métiers de la médecine et de l’administration, mais c’était bien en formation annexe une fois que la crème des candidats étaient orientés vers l’enseignement. L’administration coloniale avait conscience que l’école étant le socle du devenir d’un pays, la réussite du nouveau projet de société qu’elle envisageait d’instaurer passait nécessairement par elle et qu’en conséquence, il fallait la confier, cette école, aux meilleurs de ses cadres. Par ce choix éclairé, l’EWP a pourvu les pays d’Afrique francophone subsaharienne de ressources humaines exceptionnelles, des enseignants de grand talent des hommes politiques hors pair qui ont porté nos pays à l’indépendance et contribué à en faire des républiques et des nations viables, on peut citer entre autres : Houphouët-Boigny de la Côte d’Ivoire, Modibo Keita du Mali, Emile Derlin Zinzou du Bénin, Hamani DIORI du Niger et au Sénégal on peut également citer Mamadou DIA, Assane Seck, Me Kéba Mbaye, Pr. Abdoulaye Wade, l’ancien Recteur de l’UCAD, Prof. Souleymane Niang ainsi que d’autres éminences qui ont fortement contribué à la construction de nos Etats. A tous ces héros, toutes ces pépites de Ponty, notre amicale ne cessera de rendre hommage à des occasions comme celle-ci. Mais pour que cet hommage soit pérenne, notre devoir de mémoire doit se réaliser par la restauration d’un des sites historiques ayant abrité PONTY, en l’occurrence ici le site de SEBI-PONTY.
A ce noble projet de réhabilitation, que notre amicale dès sa création a inscrit comme une priorité, nous appelons les autres associations de normaliens (celles de Mbour, de Saint-louis, de Bambey, celle des normaliennes de Germaine Le Goff dont nous saluons la présence dans la salle), pour qu’ensemble dans le cadre d’une fédération, nous réussissions à refaire de ce site un foyer ardent pour l’éducation et la culture mais aussi un lieu de mémoire.
Dans un contexte où les bases mêmes de nos jeunes républiques et de nos jeunes nations sont menacées, et où nos systèmes éducatifs traversent des difficultés, il est plus que jamais impérieux de retrouver des repères d’intégration sociale et d’excellence scolaire.
Il ne fait pas de doute que l’ENWP fait partie de ces repères et en occupe sûrement l’une des toutes premières places.
C’est pourquoi notre amicale ambitionne de faire de ce site un complexe abritant à la fois un musée de l’éducation, une bibliothèque, un institut développant diverses formations liées tout à la fois aux métiers de l’enseignement, aux métiers émergents, aux TICS, à l’emploi vert, ainsi qu’une offre de seconde chance aux multiples jeunes déscolarisés, de l’école et de l’université. Bref, ce complexe sera un creuset communautaire de savoirs et de savoirs faire, de comportements et modèles de comportements à inculquer aux jeunes générations pour leur réarmement moral et professionnel sans lequel le développement est difficile à réaliser.
Le site de SEBI-PONTY restauré en complexe éducatif d’excellence constituera un cadre physique de retrouvailles des pontins et de tous les normaliens en général pour mobiliser davantage et organiser toute l’expérience dont nous sommes porteurs les uns et les autres en matière d’éducation afin de continuer à soutenir le système éducatif de notre pays, plutôt que de la laisser se disperser, cette expérience, au prétexte que nous avons droit au repos.
Notre pays encore confronté à des défis majeurs surtout en matière d’éducation ne peut pas se payer le luxe de mettre à la marge des ressources humaines d’aussi grande qualité ayant toute une expérience de carrière, une expérience qui couvre l’ensemble du système éducatif tous cycles, secteurs et sous-secteurs confondus, de les mettre à l’écart en raison de leur âge, un âge qui est justement celui de la sagesse, celui de la clairvoyance et de l’efficacité. Cela n’est guère conforme à l’ambition d’émergence à laquelle aspire notre pays, ni non plus à notre héritage culturel, puisque en wolof on dit « mag mat naa bayyi ci reew », ce n’est sûrement pas pour les mettre à l’écart mais bien plutôt pour pouvoir profiter de leurs connaissances et de leurs conseils.
Nous terminerons en exprimant au Ministre de l’Education Nationale, invité en qualité de président d’honneur, l’engagement et la disponibilité de notre amicale à collaborer avec son institution pour aider notre pays à relever les défis de l’éducation.
Nous renouvelons nos remerciements à Monsieur le Doyen de la FASTEF ainsi qu’à son assesseur pour leur accueil généreux dans cet établissement, qui a été pour beaucoup d’entre nous la deuxième étape de notre parcours après WP.
Aux différentes associations de normaliens venues répondre à notre invitation, nous tendons la main pour un partenariat fécond dans le cadre d’une fédération à la création de laquelle nous les convions pour une école sénégalaise qui avance.
A mes collègues panélistes ainsi qu’à Monsieur le modérateur nous disons nos remerciements et félicitations d’avoir accepté malgré les contraintes d’aborder une thématique aux enjeux aussi importants pour notre pays.
A toutes et à tous, nous disons merci !
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MODÈLE D’ÉDUCATION SÉNÉGALAIS, CONTINUITÉS, RUPTURES ET PERSPECTIVES,
PAR LE Pr SOULEYMANE GOMIS |
- MEMBRES DU GROUPE DE RÉFLEXION SUR L’ÉDUCATION AU SÉNÉGAL
- Pr. Souleymane Gomis (Sociologue)
- Pr. Abdoul Aziz Kébé (Linguiste)
- Pr Penda Mbow (Historienne)
- Dr Fatou Kiné Camara (Juriste)
- Dr Cheikh Guèye (Géographe)
- Dr Bakary Samb (Islamogue)
QUI SOMMES-NOUS ?
- Un Groupe de Réflexion sur l’Éducation au Sénégal (GRES) composé d’enseignants-chercheurs, de chercheurs, de politiques, de membres de la société civile et des personnalités du monde diplomatique.
QUEL EST NOTRE OBJECTIF ?
- L’objectif du Groupe est :
- de donner à la réflexion sur ce secteur une dimension prospective (sur le moyen et long terme),
- d’opérer une analyse profonde qui va au-delà de la recherche de solutions segmentées, cloisonnées et inhérentes aux manifestations des crises que sont les grèves, les marches, les sit-in, les contestations et autres revendications allant de l’élémentaire au supérieur en passant par le moyen et le secondaire.
MÉTHODOLOGIE OU DÉMARCHE
- Une approche systémique de l’éducation au Sénégal (articulation simultanée de plusieurs segments de la vie de notre société)
- Exploration de l’état de l’éducation par les entretiens, les lectures et l’observation
- Analyse documentaire approfondie des différents types de documents écrits, audios et filmiques existants sur la problématique de l’éducation au Sénégal.
- Le GRES a établi plusieurs idées fortes qui ont structuré toute la réflexion scientifique, stratégique et prospective sur la question de l’éducation au Sénégal.
ÉTAT DES LIEUX DE L’ÉDUCATION AU SÉNÉGAL
I.L’école sénégalaise en crise de modèle, de contenu et de finalité.
- On note une absence d’orientations stratégiques répondant à un modèle éducatif partagé par la société sénégalaise et les acteurs qui l’animent.
- 40 ans après les Etats généraux de l’éducation, il ne reste plus grand-chose en termes de choix réalisé, tenu et évalué.
- On constate un passage à une éducation de masse pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) provenant des injonctions du FMI et la Banque Mondiale.
- Cette nouvelle situation a suscité plus d’interrogations, de problèmes que de résultats ou de solutions.
INTERROGATIONS OU QUESTIONS :
♣ Quel est aujourd’hui le modèle d’éducation sénégalais ?
♣ Quel est son fil conducteur?
♣ Quels sont ses objectifs et ses méthodes ?
♣ Quelles sont ses finalités ?
♣ Quels sont les continuités à entretenir ?
♣ Quelles sont les ruptures à entreprendre ?
♣ Quelles sont les normes minimales de qualité atteintes aujourd’hui au-delà des chiffres maquillés ou non ?
♣ Faut-il préserver la possibilité de former une élite et dans ce cas comment procéder ?
DIFFÉRENTS MODÈLES D’ÉCOLE AU SÉNÉGAL
♣ école dite « française », privée et publique,
♣ école dite « franco-arabe », privée et publique,
♣ école coranique (elle-même de différents types),
- daara tarbiyya,
- daaras modernes,
- daaras qui se prétendent comme tels, sans contrôle,
♣ écoles communautaires de base,
♣ écoles privées confessionnelles catholiques, musulmanes
♣ réseaux croissants d’écoles étrangères en provenance du Moyen Orient et d’Asie,
♣ cases des tout-petits,
♣ maisons de l’outil,
♣ Enseignement technique et professionnel,
INADAPTION DES CURRICULA AU MODÈLE DE SOCIÉTÉ
- Une grande partie de la population reste réticente à l’école dite française et les réponses sont encore incomplètes et peu satisfaisantes pour convaincre et faire adhérer.
- De manière générale, l’école incarne aujourd’hui beaucoup moins qu’avant les valeurs sociales et citoyennes.
- Les Sénégalais ont perdu foi dans le sens de l’école comme ascenseur social.
- Même si nous nous accordons sur une montée considérable des effectifs à l’école, cependant force est de reconnaitre qu’il y a une baisse grave de niveau et de qualité des enseignements. Il y a également une inadaptation des curricula.
SYSTÈMES D’ÉDUCATION FORGÉS DE L’EXTÉRIEUR AVEC DES MISSIONS, DES VISIONS, DES FINALITÉS DIFFÉRENTES
- On assiste de plus en plus chez les populations à une représentation positive de l’école privée porteuse de qualité, du fait qu’elle demeure sans grève et garantit les standards et les minimas de quantum horaire contrairement à l’école publique.
- Dans ce contexte, les initiatives privées se multiplient de la maternelle à l’université, de l’école laïque, à l’école confessionnelle catholique, franco arabe, bilingue, turc (yavuz selim), iranienne (IMI), aux écoles musulmanes moyen-orientales, du Maghreb, etc (AMA, Frères d’Égypte).
- Il se développe ainsi parallèlement plusieurs systèmes d’éducation forgés de l’extérieur, avec des missions, des conceptions et des visions différentes dans notre pays.
- Il s’y ajoute aussi le vaste secteur dit informel qui compte des milliers d’écoles coraniques allant des daaras structurés permanents aux daaras où la mendicité prime sur l’enseignement.
PERTE DE CONTRÔLE DE L’ÉTAT SUR LE DOMAINE LE PLUS STRATÉGIQUE DE NOTRE NATION
- Toutes ces écoles que nous venons d’énumérer rendent compte de l’inégale prise en charge par l’Etat de la problématique de l’éducation.
- Cela traduit également la perte de contrôle de l’État sur le domaine le plus stratégique de l’avenir de notre nation.
- L’école continue à discriminer les enfants (classes pléthoriques ou moyennement remplies, répartition inégale de la formation informatique, des enseignants de qualité, privés contre public, enseignement laïc contre enseignement religieux, médersas musulmanes contre daaras, etc.).
- Tout en se démocratisant, elle entretient paradoxalement une injustice et des inégalités de chances de réussite entre les Sénégalais.
STRATÉGIES DES RÉFORMES ÉDUCATIVES
- De manière générale, les réformes qui sont faites dans le sens d’intégrer l’arabe, le religieux et les langues nationales pour répondre à la demande d’une école plus « sénégalaise » constituent des tactiques pour gagner de nouveaux publics et non des choix stratégiques d’enseignement et d’éducation adossés à un projet de société global.
- L’école d’aujourd’hui marquée par une dispersion extrême reflète et renforce une désintégration des référentiels traditionnels endogènes, sur le fondement du système éducatif.
HISTOIRE DE L’ÉDUCATION RELIGIEUSE AU SÉNÉGAL
- Le Sénégal est un pays à plus de 95% de musulmans et à presque 100% de croyants nous dit-on. Les ordres d’enseignement chrétiens sont proportionnellement bien représentés dans l’espace de l’offre éducationnelle avec une image saine et ouverte, malgré quelques insuffisances et leur dynamisme n’est plus à démontrer.
- L'éducation islamique qui est une constante dans les sociétés musulmanes sénégalaises a à contrario, un déficit de reconnaissance, de respect et de structuration. Pourtant l'instruction est une obligation et l'accomplissement du rituel est fortement lié à un ensemble de règles que le musulman doit respecter, en collectivités ou en intimité.
ENSEIGNEMENT ARABO-ISLAMIQUE AU SÉNÉGAL : ANCRAGE HISTORIQUE, SOCIOLOGIQUE ET SCIENTIFIQUE
- Au Sénégal, l'enseignement arabo-islamique a un ancrage historique, sociologique, scientifique, territorial, fort. Il est apparu dès l'islamisation et cela s'est définitivement installé dans les écoles depuis l'empire du Ghana bien avant le saccage de Kumbi Saleh par les Almoravides en 1076.
- Le royaume du Tekrûr qui faisait partie de l'empire du Ghana était un territoire où l'islam était dominant sous le règne de Wara Diabe (mort en 1044).
- Bien avant la colonisation, l'arabe était la langue de formation des élites et les foyers d'éducation religieuse jouaient un rôle important dans ce sens.
FONDATION DES VILLES A L’INITIATIVE DES CHEFS RELIGIEUX
- Les saints et chefs religieux ont, au Sénégal, une forte tradition de fondation des villes. Ils font des daara, un instrument utilisé depuis plusieurs siècles pour faciliter le rôle de protecteur, puis d’encadrement, d’enseignement, des marabouts dans la société wolof.
- Plusieurs villes sont nées de l’initiative de marabouts ayant bénéficié de privilèges accordés par les pouvoirs en place dans la période qui a précédé la colonisation.
- Coki fondé en 1641, Pire en 1610, et Ndiaré sont les plus connus avant Mbacké par exemple.
COMPÉTITION ENTRE ENSEIGNEMENT LAÏC ET ENSEIGNEMENT ARABO-ISLAMIQUE RÉVÊT UN CARACTÈRE IDÉOLOGIQUE ET POLITIQUE
- L'enseignement arabo-islamique reste aujourd’hui une réalité au Sénégal.
- L'Etat est obligé de le prendre en considération.
- Il faut admettre que la compétition entre enseignement "laïc" et enseignement arabo-islamique revêt un caractère idéologique et politique qu’il faut désormais dépasser.
- Les marabouts de renom qui ont créé les confréries sont tous plus ou moins passés par ces écoles. La plupart des wird confrériques y ont été initiés.
NAISSANCE DE DAARA ET LEUR LÉGITIMITÉ
- Le daara résulte de l’héritage provenant d’initiatives des agents maraboutiques et il a toute sa légitimité dans un enseignement et un système d’éducation avec un contenu sénégalais.
- L’enseignement religieux musulman est une demande profonde d’une partie de la société sénégalaise, mais il souffre dans son fonctionnement et dans ses débouchés.
- La difficulté d’accueil des arabisants de retour d’études à l’étranger en est l’un des révélateurs. La constitution de ghettos à tous les niveaux de l’enseignement en est la conséquence.
RISQUE DE LAISSER LE CHAMP DE L’ÉDUCATION ENTRE LES MAINS DES ENTREPRENEURS « RELIGIEUX »
- Les réticences exprimées par rapport à la promotion de cette question de l’enseignement arabo-islamique ignorent que laisser le champ de l'éducation entre les mains d'entrepreneurs ''religieux'' est aussi dangereux sinon plus que de l’accepter et de l’encadrer.
- L'exemple des pays comme le Maroc, l'Algérie, la Tunisie ou l’Egypte peuvent nous servir d'illustration pour montrer que le meilleur moyen de ''contrer'' le radicalisme religieux c'est de lui couper l'herbe sous les pieds en offrant un enseignement de l'islam éclairé, dénué de toute forme d'idéologie politique.
INCOHERENCE, INJUSTICE ET DISCRIMINATION DANS LE SYSTÈME ÉDUCATIF : EXEMPLE DES LANGUES NATIONALES
- Au-delà des injustices fondamentales liées aux dualismes écoles-daaras, francophones-arabisants, public-privé, le problème des langues nationales est un révélateur du fossé entre le projet de société national et le système d’éducation censé le servir.
- Le Sénégal, dans son mimétisme du système hérité de la colonisation, a été piégé par le mythe dévastateur du monolinguisme unificateur comme le Jacobinisme et d’autres principes issus d’autres histoires et d’autres cultures.
- Le choix d’une langue officielle appelée la langue d’instruction dans les écoles, la langue des débats législatifs et de la participation civique, la langue du commerce – dresse des barrières et modèle les avantages dont jouissent les individus dans la vie.
IMPORTANCE DE L’ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE MATERNELLE OU LANGUE DU MILIEU
- Dans des contextes comme celui du Sénégal, il est clair que toute politique de la langue officielle unique faisant fi de la pluralité linguistique existant dans la nation est inconstitutionnelle car, elle est une source directe d’exclusion et de discrimination entre les citoyens.
- En effet, quel développement envisager quand des millions d’individus et des forces de production importantes sont ainsi marginalisées dans leur expression intellectuelle, culturelle, économique et sociale ?
- Il est désormais prouvé (Projet Elan, système d’éducation bilingue finlandais) que non seulement l’enseignement dans la langue maternelle ou du milieu permet d’éviter des années de retard dans l’acquisition de la connaissance mais encore, il développe la capacité de réflexion et d’utilisation du sens logique.
- En revanche, l’apprentissage du savoir et des savoir-faire dans une langue étrangère tend à la sous-utilisation des facultés intellectuelles des apprenants en matière de sciences et techniques.
- La mémoire se substituant au raisonnement. (Cheikh Anta Diop, Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire, Présence africaine, 1974, p. 36, 1ère édition 1960)
DU MULTILINGUISME POUR UNE ÉCOLE DU VIVRE ENSEMBLE DANS UN ETAT DÉMOCRATIQUE
- Globalement, le plurilinguisme d’État est le ciment du droit à la non-discrimination et à l’égalité de tous et toutes devant la loi. Le respect des droits linguistiques de la population est indissociable du droit à l’éducation.
- La Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant (CDE) a été intégrée à la Constitution de janvier 2001.
- En son article 29, la CDE dispose que les Etats conviennent du fait que l'éducation de l'enfant doit viser à lui inculquer, en plus du respect de ses parents, de son identité, de ses valeurs culturelles, des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, le respect de sa langue.
- Le multilinguisme dans le système éducatif sénégalais est donc indispensable dans la mise en place d’une école préparant au vivre ensemble dans un Etat démocratique.
PLURALITÉ DES SYSTÈME D’EDUCATION SOURCE D’UNE SOCIÉTÉ DE CONFRONTATION
- Avec d’un côté des écoles de l’éducation nationale organisées par l’État et de l’autre des écoles non organisées par l’État et des écoles privées qui entrent dans la catégorie des écoles dites formelles, des écoles coraniques, islamiques, des daaras d’éducation partout dans le pays.
- Il y a plusieurs types de Sénégalais qui évoluent dans des environnements éducatifs différents, parfois antagoniques.
- Ce fait alimente et justifie des discours de revanche, de stigmatisation des uns par les autres, des diplômes propres, des modes de pensée en conflits, des débouchés impossibles à organiser et des masses de frustrés à vie.
APPARITION DE PLUSIEURS TYPES DE SÉNÉGALAIS
- Il y a ainsi plusieurs types de Sénégalais qui se font face à face dans les débats sur la démocratie, les droits humains, les droits des femmes, les droits des enfants, des personnes vivant avec un handicap, le code de la famille, etc. qui considèrent l’État et ses règles de manière divergente.
- Les lignes de fracture pour le futur sont déjà établies et sont grandes de menace pour la cohésion nationale.
POUR UNE ÉDUCATION SÉNÉGALAISE DANS UN PROJET DE SOCIÉTÉ D’ENRACINEMENT ET D’OUVERTURE
- Le principal problème du système d’éducation est qu’il ne s’adosse pas à un projet de société clairement défini et n’est pas articulé à nos systèmes de pensée et de valeurs.
- Il doit être conçu et défini en rapport avec une société de synthèse à la croisée des traditions africaines endogènes et des influences arabe et française et faire l’objet d’un consensus national.
- Le projet de société défini dans le cadre des Assises Nationales, espace le plus large d’élaboration de principes et d’agendas sur la société sénégalaise est le suivant : un Sénégal démocratique, républicain, laïque et souverain, disposant d’une sécurité nationale crédible dans une Afrique solidaire intégrée et ouverte.
- Un Sénégal régi par une gouvernance fondée sur l’éthique, l’enracinement dans les valeurs morales, la démocratie participative, la concertation, le respect des institutions et des libertés individuelles et collectives
REFONTE ET REFONDATION DU SYSTÈME ÉDUCATIF ET SES CONTENUS
- Un tel projet de société doit élaborer une offre d’éducation qui permet d’atteindre des performances importantes dans la formation du citoyen, son épanouissement économique, culturel, social.
- Mais l’offre serait désincarnée, si elle ne prenait pas le temps de cerner les diverses demandes d’éducation et de leur trouver une réponse commune garantie par l’État, gardien de la réalisation du projet de société.
- En considérant tous ces éléments, le GRES propose à l’État du Sénégal et à tous les acteurs de l’Éducation un consensus sur une refonte et une refondation du système d’éducation et de ses contenus à moyen terme (5 à 7 ans).
- L’offre d’éducation peut être multiple en répondant aux demandes exprimées mais le profil du citoyen doit être unique.
- Il faut donc un tronc commun à toutes les offres et la liberté d’ajouter des branches à ce tronc.
- C’est un socle commun d’enseignement et d’éducation basé sur les objectifs du projet de société qui est le gage de la cohésion nationale et du développement du Sénégal.
« BARAN » pour dire merci en manjack.
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LA BAISSE DES PERFORMANCES SCOLAIRES EN FRANCAIS : CAUSES ET SOLUTIONS ?
PAR LE Pr MOUSSA FALL |
Il m’a été demandé d’introduire le sous thème : Baisse des performances scolaires en français au Sénégal : causes et solutions. Apparemment, c’est un des aspects du thème global : Crise scolaire, crise de l’éducation, crise des valeurs : causes, conséquences et solutions possibles.
En vérité, le sous thème est transversal, car au Sénégal comme pour la plupart des pays francophones en Afrique, le français est socialement langue de travail, d’apprentissage, voire de réussite et d’intégration. De ce point de vue, la langue française traverse tous les champs.
Dans cette communication, nous tentons d’analyser les tenants et les aboutissants de cette idée assez bien répandue relative à la baisse de niveau des élèves en français au Sénégal, tout en nous focalisant sur les causes et les solutions.
La langue française a toujours occupé une place privilégiée dans le système éducatif sénégalais. En effet, dès le début de leur installation au Sénégal, les Français lui accordèrent une attention toute particulière ; mais on parlait déjà de faiblesse de niveau en français. Pendant près de deux cents ans plusieurs stratégies ont été mises en œuvre pour pallier ce manque ; néanmoins, on parle encore aujourd’hui de baisse de niveau des élèves en français.
Pour aborder ce thème, je voudrais articuler mon propos autour de trois axes :
- Archéologie de l’enseignement du français au Sénégal ;
- Etat des lieux actuels des performances en français ;
- Causes et solutions de ladite baisse de niveau en français.
- Archéologie de l’enseignement du français au Sénégal
Dès le début de leur installation effective au Sénégal, les Français comprirent les services que pouvait leur rendre l’école en matière de diffusion de la langue française pour satisfaire d’abord des besoins urgents de communication et, plus tard, pour assurer la politique d’assimilation des indigènes.
À ce niveau, Jean-Louis Calvet (1974 : 71) précise que
« Dans tous les cas, qu’il s’agisse de la Guyane, de l’Algérie, plus tard de l’Afrique noire, l’école est donc utilisée en conformité avec un projet idéologique qui vient s’insérer harmonieusement dans le développement de la superstructure linguistique du colonialisme naissant. »
Pour ce faire, au Sénégal plus qu’ailleurs en Afrique Occidentale Française (A.O.F.), plusieurs stratégies furent mises en œuvre. L’observation et l’analyse de ces stratégies et des résultats obtenus nous permettront certainement d’avoir une opinion plus argumentée sur cette prétendue baisse de niveau.
Dès l’ouverture de la première école française à Saint-Louis en 1817, l’instituteur Jean Dard, chargé de la direction de l’école mutuelle, découvrit très vite le nœud gordien de l’enseignement de la langue française en Afrique. En effet, il s’aperçut que la langue maternelle des enfants était le wolof, et par conséquent, le français ne pouvait avoir que le statut de langue étrangère. Il se demanda alors quelle stratégie adopter :
-ou bien privilégier les leçons de langue pour installer les notions de base en français
-ou bien commencer à apprendre les langues indigènes et procéder par traduction. Jean Dard surmonta ce dilemme en empruntant la deuxième voie. Il se mit alors à apprendre le wolof avec tellement d’ardeur qu’il eut à écrire une grammaire et un vocabulaire de cette langue. Il entreprit dans son école qu’il appelait « wolof-française » ou « française- africaine » d’apprendre aux élèves à lire d’abord en wolof pour procéder ensuite à une traduction. Mais, les autorités coloniales affichaient une attitude mitigée sur l’opportunité et l’efficacité de la méthode de Jean Dard. En 1922, celui-ci sera même licencié, mais il restait convaincu de son choix. D’ailleurs, tirant le bilan de son expérience, Dard, (1926 : 213 ) persistait en ces termes :
« La civilisation des Ouolofs est plus que négligée, elle est mise à l’oubli puisqu’on a cessé d’instruire les noirs au Sénégal dans leur langue. Car quoiqu’on en dise, il faut que les noirs soient instruits dans leur langue maternelle, sans cela point d’ établissements durables, point de civilisation. »
Alors pourquoi, malgré la conviction et l’argumentaire de Jean Dard, les autorités coloniales avaient-elles choisi de sceller la rupture avec cette expérience qui donnait au français le statut de langue étrangère et prônait une approche enseignement /apprentissage axée sur la traduction (wolof-français) à l’instar de ce qui se pratiquait dans les colonies anglaises et belges où les débuts de l’instruction étaient généralement donnés dans la langue maternelle de l’enfant ? À notre avis, les déclarations et les actions de J. Dard laissent apparaître un homme sincère, à la limite naïf, qui cherchait à instruire les enfants noirs dans le respect de leur civilisation. Malheureusement, il ignorait sans doute que derrière le projet d’instruction qu’on lui demandait de faire se cachait un objectif de glottophagie et de destruction culturelle inhérent à la politique d’assimilation que la France avait optée. Par ailleurs, A. Thiriet (1967 : 4) évoque l’insuffisance des résultats de la méthode impulsée par Dard en vigueur quelques temps après le départ de celui-ci :
« Les élèves continuèrent alors à psalmodier en chœur ou à copier lettre par lettre des phrases françaises dont une traduction leur donnait la signification approximative. En 1825, il n’y a pas un seul élève sur 125 qui sut réellement le français. »
De tels chiffres nous permettent de constater qu’à ses débuts, l’enseignement du français donnait des résultats très insuffisants, voire mauvais.
On abandonna définitivement la démarche de Dard centrée sur la traduction, mais la méthode mutuelle continua à prospérer pour pallier le manque d’enseignants et pour satisfaire les besoins en personnels subalternes.
Là aussi, l’école mutuelle ne donna pas les résultats escomptés et le niveau des élèves en français n’était pas reluisant comme l’atteste le témoignage du Gouverneur Général Jubelin cité par A Thiriet (1967 : 4):
« Fort peu d’habitants savent écrire et parler correctement notre langue. La langue wolof règne exclusivement dans la colonie et même les enfants européens parlent le wolof au moins autant que le français. »
A.Thiriet (1967 : 4) rapporte plus loin, qu’en dehors de quelques élèves employés par l’administration et le commerce local, « Le reste reprend, avec les habitudes de ceux qui les entourent, l’usage exclusif de la langue wolof.»
Après 12 ans de scolarisation en français c’est encore l’échec total. Cela est révélateur du choc des cultures. En effet, le rejet de la langue du colonisateur peut apparaître comme un système de défense malgré les opportunités qu’offrait la maîtrise de celle-ci pour occuper les fonctions de commis, d’interprètes ou d’auxiliaires de l’administration, etc. Face à une telle situation de désintéressement, D. Bouche (1974 : 82) rapporte dans sa Thèse que le Gouverneur Jubelin s’impliqua personnellement en précisant les orientations de l’école dans la colonie du Sénégal :
«Amener les habitants indigènes à la connaissance et à l’habitude du français… créer chaque année parmi eux une pépinière de jeunes sujets propres à devenir l’élite de leurs concitoyens, à les éclairer à leur tour et à propager insensiblement les premiers éléments de la civilisation européenne chez les peuples de l’intérieur, tels devraient être les fruits du nouvel établissement (c’est-à-dire l’école). »
C’est dans cette perspective de propager et d’imposer la langue française pour particulièrement corriger la faiblesse de niveau que les autorités coloniales firent appel aux Frères Ploërmel pour diriger l’éducation des garçons à Saint Louis.
L’ARRIVEE DES FRERES PLOERMEL
Faut-il rappeler que les Frères sont précédés par les Sœurs de Saint Joseph de Cluny qui, depuis 1823, avaient en charge l’instruction des filles dont la plupart étaient des mulâtresses. L’objectif était de former des femmes distinguées, d’esprit vif et orné, de cœur sensible. Mais les résultats étaient décevants. D’ailleurs, en 1844, selon Denis Bouche (1974), le Gouverneur Bouet recommandait l’internat pour les filles afin de les arracher aux mauvais exemples qu’elles rencontraient sous le toit maternel et qui annihilaient les bons effets qu’on pouvait attendre de l’enseignement moral des Sœurs. Sans doute c’était pour saper les fondements de la société traditionnelle sans quoi aucune forme d’assimilation n’est possible. En vérité, nous pensons que c’est le substrat culturel qui se trouve être très profond pour empêcher la réalisation de l’assimilation par le biais de l’école.
Avec les Frères l’accent est davantage mis sur l’apprentissage de la langue française ; et l’interdiction de parler les langues locales était instituée à l’école. De plus, ils enseignaient dans leurs écoles du Sénégal exactement les mêmes choses et de la même façon que dans leurs écoles de France.
Malgré tout, A. Thiriet (1967 : 5) rapporte qu’en1847, six ans après leur installation à Saint Louis, les Frères constatèrent que « l’enseignement est donné dans une langue inconnue des enfants et que les résultats sont de pure forme et se perdent dans le psittacisme. Leur seule raison d’être satisfaits c’est que l’écriture est impeccable.»
Selon Boubacar Ly (2000 : 332), les méthodes des Frères
« présentaient la caractéristique de consister à faire réciter des manuels. Autrement dit, l’enseignement était essentiellement livresque et ne favorisait pas du tout l’expression en français et la maîtrise de cette langue. En définitive, les élèves apprenaient des tas de choses sans toujours comprendre ce qu’ils apprenaient, la langue française – que par ailleurs ils ne parlaient pas – leur échappait … Ils finissaient à force de pratique, répétitions, redoublements et longues scolarités par parler le français, mais souvent avec une prononciation défectueuse en raison des interférences avec le wolof. »
En vérité, la présence des Frères n’a pas amélioré le niveau des élèves, mais le souci d’asseoir une base en français s’en trouva accru. Cela amena Faidherbe à créer en 1856 l’Ecole des otages à Saint Louis. De plus, compte tenu de la méfiance des populations musulmanes à l’endroit de l’école française, on favorisa l’émergence d’écoles laïques, mais leur fréquentation n’était pas meilleure. Dès lors, les Autorités coloniales adoptèrent la contrainte comme le stipule l’article 5 de l’Arrêté N°6 du 22 juin 1857 du Gouverneur Faidherbe portant sur les écoles musulmanes :
« les maîtres d’école musulmane seront obligés de conduire ou d’envoyer, tous les jours, à la classe du soir (soit celle de l’école laïque, soit celle des Frères) tous les élèves de 12 ans et au-dessus ».
Cette volonté d’imposer la langue française aux autochtones est renforcée par l’Arrêté N° 85 du 28 février 1870 qui va plus loin dans les contraintes :
« Nous Gouverneur du Sénégal et dépendances… considérant que le but de l’administration de la colonie, en régularisant par ledit arrêté l’institution des écoles musulmanes, a été de rechercher à s’assimiler les enfants indigènes. Que ce but n’a pas été atteint jusqu’ici, par suite de l’indifférence apportée par les maîtres d’école.
Attendu que le moyen le plus efficace d’arriver à ce résultat paraît être d’exiger désormais que ces maîtres habituent les enfants à comprendre et à parler la langue française …
Article 1 : Nul ne pourra, à l’avenir obtenir l’autorisation de tenir une école musulmane … s’il ne justifie savoir le français devant un jury …
Article 3 : Les élèves qui suivent les écoles musulmanes devront y apprendre à parler le français. Ceux qui, au bout de deux ans ne sauront pas se faire comprendre couramment dans cette langue, ne suivront plus lesdites écoles, et ne pourraient plus fréquenter l’ école des Frères ou l’école laïque. »
Il est à noter que cet Arrêté est révélateur de l’inquiétude des autorités coloniales en face à une situation très préoccupante caractérisée par :
- la faiblesse de niveau des élèves en français malgré tout ce qui a été fait pour améliorer la qualité de l’enseignement,
- l’indifférence des maîtres d’école,
- la concurrence des écoles musulmanes qui, à la faveur d’une longue tradition, ont eu à s’implanter dans tout le pays.
Ainsi, la langue arabe et la religion musulmane ont été l’objet de préjugés très défavorables de la part des autorités coloniales.
En somme, malgré les contraintes et tous les efforts consentis, quatre vingts ans après l’implantation de la première école à Saint Louis, E. Chaudié, Gouverneur général de l’A.O.F. , eut à constater avec amertume dans une Circulaire de1896 citée par Denis Turcotte (1983 : 33 ) :
« Au cours des différentes tournées que j’ai eu l’occasion de faire à l’intérieur de la colonie … c’est à peine dans les chefs lieux de cercle qu’ on rencontre un certain nombre d’élèves assidus à suivre les cours, et si parmi ceux-là quelques-uns ont appris de rares mots de français. Il y a là une situation à laquelle il importe de remédier le plus tôt possible… l’école est en effet, le moyen d’action le plus sûr qu’une nation civilisatrice ait d’acquérir à ses idées les populations encore primitives et de les élever graduellement jusqu’à elle … c’est par l’école, et l’école seule, que nous y arriverons. »
Cette politique d’assimilation par le canal de l’école sera entretenue et vivifiée par le successeur de Chaudié.
En effet, dans la circulaire N° 82c du 30 août 1910 relative à l’enseignement, le Gouverneur William Ponty jette un éclairage sur la politique linguistique et les besoins de massification de l’enseignement que la France entreprenait dans son empire par le biais de l’école :
« Après avoir formé une élite de jeunes gens appelés à seconder nos efforts, nous devons nous préoccuper au plus grand nombre possible de nos sujets … l’école est le meilleur instrument du progrès… nul n’ignore en effet que l’étude du français est le remède le plus efficace qui puisse être opposé au fanatisme et l’expérience nous apprend que les musulmans qui connaissent notre langue sont moins imbus de préjugés que leurs coreligionnaires qui ne savent que l’arabe ».
En conséquence, l’usage des langues locales était interdit à l’école comme l’attestent d’une part l’arrêté N° 1207 du 27 octobre 1911 : « L’emploi des idiomes locaux est vigoureusement évité » ; d’autre part l’article fixant l’organisation générale de l’enseignement en son article 34, alinéa 4 : « Il est interdit aux maîtres de se servir avec leurs élèves des idiomes du pays. »
La langue française était imposée aux écoliers dans l’enceinte de l’école et en famille. Pour ce faire, les enseignants avaient inventé un système de contrôle très contraignant voire humiliant : le symbole. Celui-ci était un objet rebutant (crâne d’animal mort, plaque de bois, dent de cochon…) que tout écolier surpris en train de parler sa langue maternelle devait porter ostensiblement autour du cou.
Nonobstant ces mesures, on relève dans un rapport de 1913 du directeur de l’Ecole Normale de Saint Louis que de façon générale «la lacune c’est toujours le français. Très peu le parlent correctement, la plupart ne savent pas le lire, encore moins l’écrire. »
- Etat des lieux
Un échec scolaire notoire. Les résultats alarmants des différentes évaluations sur la lecture et les réformes répétitives des méthodes pédagogiques sont autant de signes qui témoignent de l’existence de difficultés sérieuses en matière d’apprentissage de la lecture dans les systèmes éducatifs africains. À titre d’exemple, la fondation William et Flora Hewlet a procédé en 2009 à une évaluation des compétences fondamentales en lecture au Sénégal. L'évaluation a eu lieu de mai à juin 2009 dans des classes de CE1 (troisième année de scolarité) dans 50 écoles situées dans 11 régions du Sénégal. Globalement, les résultats indiquent que le nombre d'élèves ne sachant pas lire du tout est très élevé. Près d'un élève sur cinq n'a pas pu lire un seul petit mot d'une petite histoire (soit 123 élèves sur les 687 ayant subi le test), alors qu’à leur stade de scolarisation ils devraient acquérir tous les rudiments de base d’une bonne lecture. Parmi les élèves qui ont pu entamer la lecture de l'histoire, les résultats demeurent néanmoins très faibles avec une moyenne de 22,5 mots correctement lus par minute .
Plus tard, en 2014, le Programme d’amélioration des systèmes éducatifs (PASEC) de la Confédération des Ministres de l’Éducation des États et des Gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN) a produit un rapport sur les performances des systèmes éducatifs en Afrique subsaharienne francophone. Cette autre évaluation a montré que « la quasi-totalité des systèmes éducatifs primaires évalués présentent des lacunes majeures, annonciatrices de difficultés d’apprentissage pour les élèves à l’avenir. Pour certains pays, le pronostic est inquiétant pour des classes d’âges entières. En début de cycle, plus de 70 % des élèves n’ont pas atteint le niveau « suffisant » en langue, et plus de 50 % en mathématiques. En fin de cycle, près de 60 % des élèves sont en deçà de ce niveau dans les deux disciplines. En 2015, le Rapport de l’évaluation des performances des élèves du CI en lecture et en mathématiques, réalisé par Le Programme d’amélioration de la qualité de l’équité et de la transparence dans l’éducation de base au Sénégal révèle qu’en lecture le score moyen national est de 39.79 sur un total de 100 points. Plus récemment, en 2019, les dernières évaluations du PASEC, surtout pour le cycle d’éducation au primaire relèvent toujours une faiblesse des acquis d’apprentissage chez de nombreux élèves à l’issue du temps de scolarisation obligatoire. Les acquis en mathématiques et en français, langue d’apprentissage prépondérante utilisée restent faibles. La faiblesse en langue d’apprentissage est préoccupante car elle est le principal facteur handicapant les apprentissages dans les autres disciplines. Ceci serait en grande partie lié à un déficit d’apprentissage en début de scolarité. En effet, 27% des élèves des quatorze (14) pays concernés par l’étude se situent au niveau 1 ou en dessous de ce niveau. Autrement dit, ils « éprouvent de grandes difficultés dans le déchiffrage de l’écrit et l’identification graphophonologique (lettres, syllabes, graphèmes et phonèmes). Or, il est admis que l’identification des lettres est un levier essentiel pour asseoir la compétence de lire. En effet, en début de scolarité primaire, la connaissance des lettres de l’alphabet constitue la première forme d’apprentissage associatif entre unités écrites et unités orales du langage. La maîtrise du nom des lettres fournit également un grand nombre d’indices permettant de déduire le son des lettres et d’établir ainsi les premières correspondances graphème-phonème disait Treiman, 2006. Cette dimension est bien perçue dans le Curriculum de l’Education de base du Sénégal. Ainsi, aux étapes 1 et 2, du CI au CE2, les composantes, portant l’acquisition du savoir lire, sont systématiquement appliquées, à savoir : la conscience phonologique et le principe alphabétique, l’identification des mots, le vocabulaire, la lecture compréhension et la fluidité. L’éducation préscolaire n’est pas en reste, car le Guide de l’enseignement bilingue de l’éducateur-trice (2021) met l’accent sur le principe alphabétique pour installer la compétence de lecture.
Au demeurant, le défi reste la mise à la disposition des enseignant(e)s de ressources éducatives de qualité, adaptées à de tels besoins d’apprentissage dans des contextes de limitation des ressources financières et d’arbitrage difficile entre différents enjeux pour les pays africains, en l’occurrence ceux du PASEC.
D’autres données sont révélatrices de la situation.
Cf Tableau des statistiques du CREM 2021.
2. Causes et Solutions
Le Sénégal, un pays francophone, est marqué par une diversité linguistique et ethnique (plus de 25 langues). Le wolof reste la langue la plus parlée dans cet espace géographique. Le français est l’unique langue officielle, à la fois langue de l’enseignement, de l’administration et de toutes les institutions de la République là où aucune de nos langues ne joue ce rôle. Cette politique linguistique n’est pas sans conséquence car selon Cissé : « les conséquences d’une telle politique se traduisent sur le terrain par l’exclusion économique et politique de l’écrasante majorité de la population qui ne maîtrise pas le français. Sur le plan éducatif, c’est entraver le développement cognitif de l’enfant en le plaçant d’emblée devant des barrages lourds de conséquences pour la suite de son apprentissage. S’il est clair que la langue est le moyen privilégié pour exprimer la pensée de tout un peuple donc l’on peut comprendre qu’en dépouillant un peuple de sa langue on le vide de son génie. De ce fait le premier pas de lutte pour la liberté de tout un peuple doit être celui du développement de sa langue étant donné que : « la langue maternelle garantit le décollage intellectuel de l’enfant lui apporte l’équilibre intellectuel fondamental sans lequel il s’atrophie » (Gandolfi, 2001). A partir de ce moment, les langues nationales doivent jouer un rôle beaucoup plus significatif ce qui leur permettra d’être reconnues comme langues capables de contribuer au développement d’ordre général.
L’UNESCO n’a cessé de recommander le recours aux langues maternelles pour l’éducation formelle que non formelle. De Téhéran (1962) à Dakar (2000) en passant par Jomtien (1990) et Hambourg (1997) pour ne citer que quelques dates marquant des conférences de cet organisme. Des voix ne cessent jamais d’affirmer avec force et juste raison que l’éducation fondamentale ne peut se faire de façon optimale que par le biais des langues maternelles. La commission technique N°2 de la CNREF issue des États généraux de 1981 soulignait dans son rapport que : « les langues nationales sont un fait de notre culture ; elles constituent certainement notre instrument privilégié et irremplaçable de communication. Elles sont seules aptes à promouvoir réellement le génie créateur de notre peuple ainsi que sa personnalité. Elles sont seulement aptes à favoriser son épanouissement économique, social et culturel dans le cadre d’un développement endogène ».
On pourrait multiplier les citations et justifications mais ça ne serait que répétition car ces faits ont déjà fait l’unanimité.
Pour rappel, le Sénégal a développé plusieurs expériences sur l’enseignement des langues nationales avec les classes télévisuelles ( CT) et non télévisuelles (CNT) de 1977 à 1984, les écoles communautaires de bases , la mise à l’essai de 2002-2008, les écoles communautaires élémentaires rurales, les expériences développées par la société civile ( ADLAS, ARED, EMILE), l’initiative ELAN-Afrique et plus récemment le programme de lecture pour tous démarré en 2016.
Cette introduction aura un double rôle :
- Faciliter l’apprentissage au primaire des mécanismes de bases tels que la lecture et l’écriture afin de préparer la compréhension de la première langue étrangère qu’est le français ;
- Une alphabétisation faite dans les langues nationales est une économie pédagogique et matérielle parce qu’en plus de l’effort d’apprendre à lire et à écrire, elle n’exige pas l’effort d’apprendre à penser dans une langue étrangère. Sur ce, le professeur Cheikh Anta DIOP nous fait une belle démonstration dans Nations nègres et cultures :
« Le jour même où le jeune africain entre à l’école il a suffisamment le sens logique pour saisir le brin de la réalité contenu dans l’expression : un point qui se déplace engendre une ligne. Cependant, puisqu’on a choisi de lui enseigner cette réalité dans une langue étrangère il lui faudra atteindre un minimum de 4 à 6 ans au bout desquels il aura appris assez de vocabulaire et de grammaire, reçu, en un mot, un instrument d’acquisition de la connaissance, pour qu’on puisse lui enseigner cette parcelle de réalité » (p. 415, Tome II)
Il poursuit:
« Il est plus efficace de développer une langue nationale que de cultiver une langue étrangère, un enseignement qui serait donné dans une langue maternelle permettrait d’éviter des années de retard dans l’acquisition de la connaissance. Très souvent, l’expression étrangère est comme un revêtement étanche qui empêche notre esprit d’accéder au contenu des mots qui est la réalité le développement de la réflexion fait alors placer à celui de la mémoire (…). On pourrait objecter la multiplicité des langues en Afrique noire, on oublie alors que l’Afrique est un continent au même titre que l’Europe, l’Asie, l’Amérique, or, sur aucun de ceux-ci, l’unité linguistique n’est réalisée, pourquoi serait-il nécessaire qu’elle le fût en Afrique ?
Cette analyse de Cheikh Anta Diop met à nu le prétexte évoqué par nos autorités étatiques politiques depuis notre indépendance, leur motivation était de maintenir la langue française comme langue officielle par difficulté d’unité linguistique.
Heureusement, il y a le MOHEBS.
COMPOSANTES ET OPPORTUNITES
Huit composantes ont été retenues pour une bonne mise en œuvre du MOHEBS :
1- Programmes ;
2- Communication et mobilisation communautaire ;
3- Formation des acteurs et des actrices ;
4- Matériel didactique ;
5- Suivi-évaluation ;
6- Recherche-action ;
7- Pilotage ;
8- Gestion financière.
ACCOMPAGNEMENT SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE
- développer un curriculum bilingue ;
- développer les capacités des langues nationales à servir d’outils d’enseignement à l’école élémentaire ;
- développer des approches novatrices en matière d’enseignement/apprentissage ;
- renforcer les capacités d’intervention des maîtres et des directeurs, des personnels de contrôle et d’encadrement, des CGE, des formateurs de la FASTEF et des CRFPE;
- développer des stratégies de soutien et d’accompagnement communautaires ;
- adapter les outils et ouvrages importants en langues nationales.
Pour conclure, l’enjeu est un portage institutionnel.
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APPORTS DU NUMERIQUE AU RELEVEMENT DE LA QUALITE DES ENSEIGNEMENTS-APPRENTISSAGES AU SENEGAL?
PAR LE Pr ALIOUNE MOUSTAPHA DIOUF |
Contexte de l'utilisation du numérique dans le système éducatif sénégalais
- Utilisation généralisée du numérique relativement récente mais en pleine expansion. Il existe des projets expérimentaux depuis les années 1983 (LOGO)
- Plusieurs initiatives visent à introduire le numérique dans le système éducatif
- Nombreux programmes de formation des enseignants pour la maîtrise du numérique éducatif
- Equipement des établissements scolaires en infrastructures numériques
- Pas encore de réelle politique d'intégration du numérique dans le système éducatif.
Apport du numérique à l'enseignement
Messagerie électronique (ex gmail) pour communiquer avec les élèves, les collègues, les parents
- Echanges rapides et directs grâce à la messagerie instantanée (ex WhatsApp) ou celle des plateformes LMS telles que Moodle
- Outils de visioconférence tels que ZOOM pour tenir des réunions virtuelles, des classes à distance
- Réseaux sociaux (ex Facebook) pour partager des informations importantes avec les élèves
- Blogs et sites web pour partager des informations, des ressources et des mises à jour avec les élèves
Apport du numérique à l'enseignement
- Amélioration de la communication
Messagerie électronique (ex gmail) pour communiquer avec les élèves, les collègues, les parents
- Echanges rapides et directs grâce à la messagerie instantanée (ex WhatsApp) ou celle des plateformes LMS telles que Moodle
- Outils de visioconférence tels que ZOOM pour tenir des réunions virtuelles, des classes à distance
- Réseaux sociaux (ex Facebook) pour partager des informations importantes avec les élèves
- Blogs et sites web pour partager des informations, des ressources et des mises à jour avec les élèves
Apport du numérique à l'apprentissage
- Amélioration de l'apprentissage
Accès facile à une vaste quantité de ressources éducatives en ligne :livres électroniques, articles, vidéos, simulations interactives, tutoriels, etc.
- Apprentissage interactif et multimédia : participation à des activités interactives, manipulation de simulations virtuelles, visualisation de modèles en 3D, observation de vidéos éducatives, suivi d'enregistrements audios. Concepts abstraits rendus concrets et compréhension facilitée.
- Mise en place d'environnements d'apprentissage adaptatif : le contenu et les activités sont personnalisés en fonction des besoins et des compétences de chaque élève. Outils d'évaluation et de suivi pour fournir un soutien ciblé.
- Collaboration et apprentissage social : discussions en ligne, forums et réseaux sociaux éducatifs.
- Feedback et évaluation : rétroaction instantanée grâce à des outils d'auto-évaluation et de correction automatique.
Projets réussis dans l'enseignement-apprentissage
- Projet NumEduc : écoles franco-sénégalaises de Dial Diop et de Fann, établissements publics sénégalais, CRFPE de Rufisque.
- Apprendre à programmer avec Scratch https://www.youtube.com/watch?v=pdtMUgnmRa4 8 mn sur 14 mn 52
- Canal Education – Apprendre à la maison https://canal.education.sn/home/player/337 7 mn sur 10 mn 51
- Projet Smart Education – Mise à disposition de Smart Classrooms pour les écoles Mise à disposition de Smart Classrooms pour les écoles (facebook.com) 3 mn sur 3 mn 47
Limites et défis
- Accès inégal aux ressources numériques : villes - campagnes
- Coûts d'acquisition du matériel informatique et des logiciels, de maintenance et de mise à jour
- Formation insuffisante des enseignants à l'utilisation efficace du numérique
- Absence de contenus numériques de qualité dans certaines disciplines
- Variation de la qualité des ressources numériques disponible (pertinence, exactitude)
- Défis liés à la sécurité et à la protection des données (lutte contre le piratage).
Perspectives
- Le numérique peut offrir des opportunités éducatives pour les enfants qui, autrement, n'auraient pas la possibilité de fréquenter une école traditionnelle
- Les enseignants ont la possibilité d'utiliser les ressources pour rendre l'apprentissage plus intéressant et plus interactif.
- Les élèves peuvent travailler sur des projets en ligne et se connecter avec des pairs d'autres pays
- L'intelligence artificielle offre des perspectives intéressantes mais il faut en garantir une utilisation éthique et responsable :
- L'utilisation de ChatGPT à l'école nécessite une supervision et un encadrement https://chat.openai.com/
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REVUE DE PRESSE
CRISES SCOLAIRES
D'anciens pensionnaires de l'École normale William Ponty diagnostiquent le mal
Une refondation du système éducatif pour faire face aux crises dans le secteur. C'est ce que recommandent d'anciens pensionnaires de l'École normale William Ponty.
L'Amicale des anciens élèves de l'École normale, William Ponty, a organisé, le 17 mai dernier, sa première conférence annuelle de l'an- née. Le thème a porté sur « Crise scolaire, crise de l'éducation, crise des valeurs causes, conséquences et solutions possibles. D'après Souleymane Gomis, professeur de sociologie, à l'Ucad, l'école sénégalaise est en crise de modèles et de contenus. Il a affirmé que l'école sénégalaise est marquée par l'extrême dispersion et la coexistence de plusieurs modèles d'éducation sans sens commun ni principe directeur. Pour lui, la diversité d'écoles qui existe n'est pas sans conséquences. Avec ces différents types d'écoles, il y aura forcément de conflits, une crise entre les sortants de ces établissements qui n'ont rien en commun. Le Pr Souleymane Gomis a, par ailleurs, fait part d'une absence d'orientation stratégique répondant à un modèle éducatif partagé par la société sénégalaise et les acteurs du secteur. De son point de vue, une bonne partie des Sénégalais restent réticente à l'école dite française. Pour eux, les réponses pour adhérer à ces écoles sont incomplètes, peu satisfaisantes et peu convaincantes. De plus, a-t-il informé, les Sénégalais ont perdu foi au sens que l'école sénégalaise n'est plus considérée comme ascenseur social. Car aujourd'hui, aller à l'école ne signifie pas trouver du travail.
En outre, le Pr Souleymane Gomis a évoqué l'inadaptation des curricula qu'il faut impérativement revoir, les effectifs pléthoriques dans les classes, la baisse des performances des élèves, et de la qualité des enseignements. En ce sens, il a affirmé que l'État a une perte de contrôle pour ce qui est du domaine stratégique de la formation. Dans le même sillage, le paneliste a évoqué le respect du quantum horaire, mais également l'apport du numérique au relèvement de la qualité des enseignements apprentissages au Sénégal.
Pour le président de l'Amicale des anciens élèves de l'École normale William Ponty, Modou Ndiaye, il va falloir stabiliser le volume horaire des enseigne- ments. Il trouve inadmissible de perdre, chaque année, 300 heures de cours et de vouloir obtenir de la qualité.
Pour sa part, le spécialiste en pédagogie numérique, Pr Alioune Moustapha Diouf, s'est appesanti sur l'apport du numérique au relèvement de la qualité des enseignements/apprentissages. À son avis, avec le numérique, les enseignants ont la possibilité d'utiliser les ressources pour rendre l'apprentissage plus intéressant et plus interactif. Les élèves, a-t-il renseigné, peuvent aussi travailler sur des projets en ligne et se connecter avec des pairs d'autres pays. M. Diouf a soutenu que le numérique peut offrir des opportunités éducatives pour les enfants qui n'auraient pas la possibilité de fréquenter une école traditionnelle. Il n'a pas manqué de signaler la formation insuffisante des enseignants à l'utilisation efficace du numérique, l'absence de contenus numériques de qualité actuellement dans certaines disciplines et l'acquisition. difficile du matériel informatique, des logiciels, entre autres.
Maguette Gueye DIEDHIOU
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